ALTERSOUND 2013-2015

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La nouvelle création du VOC

ALTERSOUND

Un conte musical pour parler d’échange, du partage entre les êtres, des couleurs et de ce qui permet de vivre ensemble. affiche-CASTING-A3-alter-sound-2015-v1 Notre vécu artistique et humain de ces cinq dernières années, notre ancrage dans le quartier de La Busserine, nous ont amené à tisser notre réflexion autour des problématiques du quartier, à y mêler les questionnements actuels, artistiques et humains, de l’équipe. Aujourd’hui, après ces deux années d’expériences autour du concept d’alterité, nous élargissons notre champ d’action à plusieurs autres quartiers du nord de Marseille : d’autres quartiers, enclavés, oubliés parfois, croisant les préoccupations rencontrées à La Busserine. Aujourd’hui, la relation entre forme et fond, structure et contenu, constitue le moteur principal du nouveau projet du VOC « Altersound » : trouver une structure, une forme, un langage spécifique pour exprimer une réalité individuelle et collective.

La création pour parler du monde

Le projet ALTERSOUND a tout d’abord une ambition artistique puisqu’il a pour vocation de faire découvrir un genre musical à un public qui peut a priori en sembler éloigné, en associant directement les participants à la création d’un spectacle d’opéra. Toutefois, le projet de création vise également à faire réfléchir chaque participant à son positionnement par rapport à l’autre au sein de la société. En effet, les participants, appartenant à différentes catégories d’âge (du jeune enfant à la personne âgée) sont invités à imaginer la société telle qu’elle sera dans 128 ans.

Cela permet surtout aux plus jeunes d’interroger la notion de citoyenneté, puisqu’ils doivent se projeter adultes au sein d’un système dont ils ont imaginé les règles, et les interactions entre les différents groupes qui le composent. Au cours de chaque atelier, un temps est réservé, sous forme de questions/réponses, les enfants suggèrent de nouvelles idées qui viennent nourrir l’histoire qui sera l’objet de la production finale, qui se structurera autour d’un spectacle d’opéra et de son livret. Les idées sont collectées par l’auteure, Fanny Blondel, chargée de les retranscrire sous la forme d’un livret.

En dehors de ce temps de création, les enfants, adolescents, adultes participants, réalisent lors des différents ateliers des exercices collectifs les obligeant à écouter l’autre. Ils sont tantôt amenés à définir des règles qui doivent être suivies par les autres, et tantôt à suivre des règles choisies par un autre membre du groupe. D’autres contraintes, imposées par l’artiste intervenante doivent par ailleurs être respectées. Ces ateliers constituent déjà en eux-mêmes un temps d’éducation à la citoyenneté, en cela qu’ils sont un espace de liberté encadré par des règles communes.

Au sein d’Altersound, chaque participant est perpétuellement invité à s’interroger sur sa place par rapport à l’autre, tant de manière directe au cours de la création, que lors des ateliers, des répétitions et de la production finale. Ce projet permettra à des groupes très hétérogènes d’échanger lors des répétitions mais également sur le plateau des représentations. On pense notamment ici à la création d’un pont intergénérationnel entre les jeunes et les personnes âgées : l’histoire projette un groupe d’adolescents questionnant les différents groupes symbolisant les différents âges de la vie sur leur manière d’appréhender le monde afin de pouvoir se trouver une place sincère et particulière dans, hors ou autour de ce système égalitaire. Par ailleurs, la trame narrative imaginée par les enfants permet une réflexion très intéressante sur l’autre : l’action se déroule dans une société en apparence idéale où l’altérité est réduite à la fonction occupée par chacun dans la société. Mis à part ce critère, il n’y aurait pas de différence entre les êtres. Au sein de celle-ci vont arriver 7 personnes « différentes » qui vont aller à la rencontre des autres, tous semblables. Cela permet à la fois aux acteurs mais aussi au spectateur de s’interroger sur la notion d’altérité : une société dans laquelle « l’autre » serait très semblable à soi-même, même si elle évite tout conflit et tout sentiment d’injustice, serait-elle souhaitable ? Comme son nom l’indique, le projet Altersound invite donc tous ses participants à s’interroger sur la notion d’altérité, par le biais de la création musicale. Il doit permettre de rappeler l’importance de l’existence de l’autre, en proposant à chaque participant d’expérimenter son rapport à l’autre au cours du processus de création, et dans le même temps de se positionner dans une société où cette question du rapport à l’autre ne pourrait plus vraiment se poser. Concept philosophique signifiant « le caractère de ce qui est autre » ou la reconnaissance de l’autre dans sa différence, notamment culturelle ou religieuse, l’altérité est la promesse de s’engager envers la singularité de chacun, hors normalisation, individuellement ou en groupe. C'est une valeur essentielle du « vivre-ensemble », qui privilégie le métissage des cultures comme source d'enrichissement et de paix, au détriment de l’isolement communautaire. Au-delà de la simple cohabitation, l’altérité pose la question primordiale de la responsabilité pour autrui : « Autrui n’est pas simplement proche de moi dans l’espace, ou proche comme un parent, mais s’approche essentiellement de moi en tant que je me sens (…) responsable de lui. » (Emmanuel Levinas, Ethique et infini, page 93, Paris, Fayard, 1982). Ce qui nous interroge aujourd’hui, artistiquement et humainement, c’est comment l’autre peut nous amener à altérer nos perceptions, comment il peut diffuser en nous un doute fécondant, source de la création.

Altersound, composition d'un livret

Le livret sera écrit par l’auteure Fanny Blondel, à partir des travaux réalisés par les différents groupes acteurs du projet tout au long de ces deux ans et demi de recherche. Il prendra sa forme définitive au plus tard à Noël 2015 . En cette mi-octobre 2015, avant l’intégration d’une partie des participants au projet, une trame a déjà été dessinée par les enfants et adolescents de La Busserine : Nous sommes plongés en 2143, en plein système 22, système d’organisation planétaire ayant permis d’éradiquer la misère, les guerres et d’adapter la vie des terriens en adéquation avec leur planète et son climat. Tout semble organisé pour l’intégration de chacun dans ce maillage humain de la planète.

L’œuvre commence directement par une cérémonie des naissances, cérémonie où le nouveau-né est remis à sa famille, après deux mois passés dans une couveuse de détermination-programmation. En effet, les mamans sont accouchées par voie médicale au septième mois de grossesse et les bébés ensuite maintenus dans cette couveuse qui permet au système 22 de cibler les meilleures aptitudes futures de ces nouveau-nés pour les préparer à la fonction qui leur sera dévolue par le système. Les humains du système 22 sont vêtus d’une combinaison s’altérant aux différentes couleurs de l’arc en ciel au fil des étapes de la vie (nouveau-né, enfants, adolescent, jeune adulte, adulte, vieillard). Au moment de cette cérémonie des naissances les enfants sont tous revêtus de blanc, tous sauf 7 bébés qui sont présentés aux parents désorientés, dans des combinaisons d’aspect multicolore. Ces 7 bébés qui, devenus adolescents entraveront le cours des fonctions programmées pour chacun par le système en partant pour un voyage initiatique en quête de sens questionner les différents groupes constitutifs du monde qui les entoure.

L'opéra, un autre langage pour se trouver

Parallèlement à l’acquisition de ce nouveau langage, des processus d’improvisation, en alternant les rôles de soundpainter et soundpainted, aideront à articuler des matériels musicaux qui constitueront les bases d’un nouveau répertoire. Ce dernier se structurera ultérieurement pour déboucher sur un parcours artistique scénique. L’utilisation et la création d’écrits seront intégrées au processus d’écriture du livret. Fanny Blondel, professeur de lettres en disponibilité, propose de mener, avec l’ensemble des différents groupes constitutifs d’altersound, des ateliers réguliers d’ici les vacances de Noël 2015. Ces ateliers fourniront la matière, « l’histoire » comme disent les enfants, permettant à Fanny Blondel, de proposer une synthèse artistique sous la forme d’un livret d’opéra intitulé « système 22 ». Nous avons organisé notre travail de création en 4 temps distincts :

  • Une première année (2013-2014) d’exploration des langages, d’accumulation de matériaux musicaux, de textes, de mouvements, donnant lieu et prétexte à des performances régulières (point de bascule, école maternelle Busserine) avec les acteurs de La Busserine.
  • Une seconde année (2014-2015) d’approfondissement de cette exploration, de structuration des différents éléments artistiques, de rencontres entre les différentes entités constituantes du projet, donnant lieu et prétexte à des performances régulières (à l’ECB, à l’Agora, au collège Pythéas) avec les mêmes acteurs que l’année précédente et l’ajout de la classe du collège Pythéas.
  • Un troisième année (2015-2016) de première étape de création d’une nouvelle œuvre vocale construite à partir des matériaux produits pendant ces deux années d’exploration, avec les différents acteurs nommés ci-dessus, produits également à partir des ateliers d’écriture mené par Fanny Blondel à l’automne 2015. Le projet sort à présent de l’enceinte de la cité de La Busserine pour s’étendre sur l’ensemble des quartiers nord de Marseille : Malpassé, La Viste, La Savine et Saint-Henri-l ‘Estaque.Cette première étape de création aboutira à trois présentations de travail en cours au printemps prochain, l’une au théâtre du Merlan (dans le cadre des envolées de mai) et les deux autres à la Friche de La Belle De Mai en collaboration avec le théâtre Massalia
  • Une dernière année (2016-2017), étape finale de création menant l’ensemble des participants à la réalisation d’un opéra, œuvre artistique ambitieuse, de rayonnement régional, portée par de grandes structures artistiques marseillaises : Le Merlan, Le théâtre Massalia, La Criée, l’Opéra de Marseille.

 

En juin 2014 puis en juin 2015, ces travaux ont donné lieu à des présentations publiques au Point de Bascule (rue Breteuil) et à l’Espace Culturel Busserine (ECB), réunissant une soixantaine d’enfants et adolescents du quartier (deux classes de primaire, une classe de collégiens et un groupe d’adolescents réunis hors-temps scolaire).